Déclaration du bureau confédéral du 2 mars 2020

Le Bureau confédéral a pris connaissance de la lettre adressée par le Premier Ministre aux organisations syndicales et patronales.

En premier lieu, FO conteste l’affirmation générale que le projet de système universel de retraite par points « révèle fortement [les injustices] dans la situation actuelle ». Le Conseil d’Etat lui-même, dans son avis, rappelle que le système actuel « manifeste par son fonctionnement même la solidarité entre les générations » du fait de « l’existence en son sein de mécanismes de solidarité, en faveur notamment des personnes ayant élevé des enfants et des personnes âgées aux ressources les plus faibles ». IL ajoute d’ailleurs que « selon les données de l’étude d’impact, les inégalités de pensions sont réduites d’un tiers par rapport aux inégalités de revenus des actifs et le taux de pauvreté est passé chez les retraités de 35% en 1970 à 7,6% en 2017. »

FO réaffirme que ce sont les difficultés et les inégalités rencontrées dans l’emploi qui sont la source de difficultés et d’inégalités qui demeurent au moment de la retraite et non le système de retraite actuel. C’est pourquoi FO n’a eu et n’a de cesse d’appeler à ce que l’accent porte avant tout sur ces questions : entrée dans l’emploi des jeunes, résorption de la précarité, des bas salaires et des inégalités de salaires et de carrières, emploi des séniors, renforcement des dispositifs de solidarité existants, prévention et compensation de la pénibilité.

FO réaffirme son attachement au système actuel de retraite qui, appuyé sur les meilleures périodes de la vie active, contribue justement, comme le rappelle le Conseil d’Etat, à résorber ces difficultés et inégalités au moment de la retraite.

Concernant la Conférence sur l’équilibre et le financement – mise en place après que le gouvernement ait annoncé son intention de mettre en place un âge d’équilibre dès 2022, allant progressivement à 64 ans d’ici 2027 – FO constate que l’objectif assigné par le Premier Ministre est bien de « demander aux Français de travailler plus longtemps » en proposant comme accompagnement la « prise en compte de la pénibilité de certaines situations de travail » dans le cadre d’un « système plus individualisé », réaffirmant qu’il prendra en dernier ressort ses responsabilités en la matière.

Sur la question de l’équilibre, FO rappelle, d’une part, que les projections du COR n’indiquent pas de dérive des dépenses de retraite mais une insuffisance de ressources, conséquence de choix de politiques budgétaires de rigueur, sur les rémunérations notamment, dans la Fonction Publique.

D’autre part, les aides publiques aux entreprises (dont le CICE qui représente à lui seul près de 20 milliards d’euros annuels, le double en 2019) atteignent environ 140 milliards d’euros annuels, soit près de la moitié du volume annuel de l’ensemble des prestations de retraite.

FO constate aussi que le Premier Ministre soumet sa réponse en matière de gouvernance et de renforcement du rôle demandé par certains partenaires sociaux, à la réussite, dans le cadre de la conférence de financement, à assurer l’équilibre financier du système de retraite. FO rappelle que le Premier Ministre avait, dès le départ, fixé des contraintes inacceptables, comme le refus de mesures conduisant à augmenter le coût du travail, autrement dit le refus de l’hypothèse de l’augmentation des cotisations, option suggérée par le Conseil d’orientation des retraites et sur laquelle, entre autres, FO est prête à négocier.

Dans ces conditions, le Bureau confédéral estime que la Conférence ne permet pas de garantir la liberté de négociation et la pratique contractuelle auxquelles FO est essentiellement attachée.

C’est la raison pour laquelle FO entend œuvrer – et s’est adressée en ce sens aux organisations patronales et aux autres confédérations syndicales – pour préserver l’espace de la négociation et du paritarisme.

Par ailleurs, autant FO est attachée au dialogue social, autant FO s’interroge sur un cadre tendant à faire apparaître celui-ci comme un substitut au débat parlementaire.

Aussi, le Bureau confédéral estime que la cohérence amène FO à refuser de cautionner l’impasse à laquelle conduit cette Conférence de l’équilibre et du financement – celle du recul à nouveau de l’âge de la retraite – et estime par conséquent le moment venu d’en sortir.

FO s’adresse en ce sens aux autres confédérations syndicales.

A tous les endroits et vis-à-vis de tous les interlocuteurs concernés, pouvoirs publics comme employeurs, FO entend continuer de faire connaître et progresser ses revendications.

Paris, le 2 mars 2020